Il y a trop de finance, comme il y a trop de carbone ; et il nous faut une transition financière, équivalente de la transition énergétique. Les citoyens doivent faire pression pour ramener vers l’intérêt général les grandes banques, gangrenées par la finance de marché. Ces banques sont perçues aujourd’hui, à juste titre, comme des dangers publics. Elles doivent redevenir des institutions utiles qui soudent une collectivité en accompagnant ses membres dans leurs initiatives.
La financiarisation de l’économie est née de la captation par les grandes banques traditionnelles d’innovations sur les marchés financiers, quand elles ont été autorisées à nouveau à faire de la finance de marché (elle leur avait été interdite après les faillites bancaires des années 1930). Les moyens énormes de ces banques, leur protection par la garantie du contribuable ont favorisé un développement fantastique en 30 ans de ces nouvelles techniques de spéculation financière.
Le bilan après 30 ans est catastrophique :
- on pense à la crise financière de 2008, à celle de 2011, à la troisième qui viendra tôt ou tard ;
- on oublie que même en temps « normal » les salles de marché, leurs traders et leurs ordinateurs sont payés in fine par les clients et l’économie réelle ;
- on oublie aussi que la volatilité de tous les prix est encouragée par la finance de marché : parce qu’elle gagne sur tous les différenciels de prix, et parce que l’instabilité les aide à vendre leurs produits financiers qui en limitent -partiellement- l’impact sur l’économie réelle ;
- et on oublie surtout que la financiarisation de l’économie a miné notre morale collective, par des écarts de rémunérations gigantesques, des banques qui trichent et jouent contre leurs clients, le culte du court terme, le crédit roi et la spéculation légitimée.
Aujourd’hui, les banques ont perdu toute légitimité avec des dirigeants « avides, incompétents et irresponsables » (Martin Wolf, Financial Times). Mais la perte de légitimité s’est étendue aux Etats qui les ont soutenues. Et la financiarisation est largement à l’origine de la montée du populisme.
Nos petits enfants seront effarés que notre génération ait pu consacrer autant d’intelligence à une activité aussi nuisible.
Enclencher la transition financière suppose de revenir sur l’erreur faite il y a 30 ans, et interdire à nouveau aux banques classiques de développer des activités de marché.
Cela réduira le risque de catastrophe financière, et libèrera l’économie d’une charge énorme. Mais, plus important encore, cela purgera les grandes banques des conflits d’intérêt actuels (la banque de marché jouant contre les clients de la banque traditionnelle) ; et cela ramènera les activités financières à un volume raisonnable : la finance utile à l’économie réelle restera, les activités financières spéculatives qui ne pouvaient se développer qu’à l’abri de la protection du contribuable, se réduiront fortement. Il restera des spéculateurs, comme à toutes les époques, mais qui joueront petit avec leur propre argent.
C’est aux citoyens, à leurs associations, d’obliger les candidats à la présidentielle doivent se positionner sur cette question.
La tension entre les Etats Unis et le Royaume Uni d’une part (les deux principaux centres financiers de la planète) et l’Europe d’autre part donne une opportunité à la France de défendre une autre finance en Europe, et d’entrainer les autres acteurs en imposant à leurs banques les mêmes règles si elles veulent continuer de vendre en Europe.
Commentaires
Le Sang et la Monnaie...
Je suis assez pour cette
Je suis assez pour cette solution. Cela aurait pour effet bénéfique de remettre la dette sous le contrôle des institutions démocratiques. En effet, pour émettre un emprunt auprès des nationaux, il faudrait une loi (cf. l'impôt "sécheresse" de 1976 - cela aurait pu être un emprunt au lieu d'un impôt - ou le "grand emprunt" initié en 2010) et donc une procédure démocratique.
Les citoyens souscrivant (éventuellement sous contrainte) seraient enclins à s'interroger sur le bien-fondé de ces emprunts... et poseraient les bonnes questions lors des élections...
Alors que les marchés n'y voient qu'une bonne occasion de faire du profit.
Bien d'accord également. C
Bien d'accord également. C'est plus largement l'idée de la finance de proximité : on prête mieux quand on prête de façon stable à des gens qu'on connait (voir la banque de Frank Capra dans La Vie est Belle que je cite dans ma vidéo). On échange malheureusement un avantage modeste (le Trésor français s'est beaucoup vanté d'emprunter moins cher à l'étranger) en échange d'un risque majeur (se mettre entre les mains de la spéculation).
Tentons une proposition concrète...
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