Débats

IA : Normer ou Innover ? L’Europe face à son dilemme

L’intelligence artificielle avance à un rythme que peu de régulateurs, juristes ou gouvernements peuvent suivre. Elle fascine autant qu’elle inquiète. Son autonomie croissante fait craindre un monde où elle évoluerait sans contrôle, jusqu’à des dérives potentiellement destructrices. Face à cette réalité, une question émerge : faut-il réguler avant d’innover ou adapter les règles après coup ? En d’autres termes, doit-on tenter d’encadrer l’inconnu ou laisser l’innovation progresser au risque de ne plus pouvoir la contrôler ? Normer l’inconnu : une illusion ? Il y a ceux qui pensent qu’il faut

Retraites – La réforme vue des antipodes

Comparer les systèmes de retraite australien et français serait provocateur dans le contexte actuel : les Australiens ont adopté, en 2014, sans trop de remous, le passage de 65 ans à 70 ans d’ici 2035. On est malgré tout tenté d’observer les choses depuis la lointaine Australie tant la distance, si elle prive de la participation immédiate aux débats, offre à l’observateur un regard un peu décalé où permanences et ruptures se distinguent davantage. La retraite est une préoccupation pour les Australiens comme elle l’est partout dans le monde. Le signe de cette préoccupation est que votre série

Résilience démocratique

Il y a deux ans, les démocraties occidentales paraissaient poussées vers un déclin inexorable. Prises au dépourvu par la pandémie du COVID elles se battaient entre elles pour obtenir de précieuses cargaisons (masques, respirateurs et autres principes actifs) venues d’une Chine disciplinée qui soulignait à l’envi le chaos occidental. Les démocraties illibérales, Hongrie en tête, s’engouffraient dans la brèche géopolitique et claironnaient la supériorité des vaccins russe et chinois pour ajouter à l’humiliation. Trump récoltait 74 millions de voix, manquait de peu sa réélection et imposait son

Rwanda : la mémoire, l’histoire, l’oubli… et le pardon

On a longtemps espéré une « sortie par haut » de la crise mémorielle liée aux responsabilités de la France au Rwanda avant, pendant et après le génocide des Tutsi. Ce fut une longue route. Encore une fois, une génération fut nécessaire pour que des mots cathartiques puissent se dire. Emmanuel Macron avait seize ans au moment des faits. Dans une séquence en trois temps ─le rapport Duclert, son discours depuis le mémorial de Gisozi et la réponse de Paul Kagamé─ le président français a réussi la sortie par le haut. Il l’a faite sous le patronage, et avec les mots, de Paul Ricoeur dont il

Le libéralisme actuel est-il antilibéral ?

De premier abord, la question a de quoi choquer. Comment oser qualifier d’antilibéral un système économique qui s’est imposé dans le monde entier comme une référence universelle, prônant la libre concurrence et la dérégulation des marchés financiers, en un mot libérant totalement l’économie mondiale de tout contrôle jusqu’à permettre à cette dernière de s’octroyer les pleins pouvoirs ? Et pourtant, si l’on fait l’effort de se replonger dans les origines de cette pensée libérale, la question prend tout son sens … Aux origines de la pensée libérale Historiquement, le libéralisme est une doctrine

Les nouvelles censures qui nous menacent

Avant on se défendait contre le pouvoir, contre les ennemis de la liberté. Maintenant il faut se défendre contre de nouveaux censeurs, contre « nos amis », contre « le camp du bien ». Cette déclaration est d’Emmanuel Pierrat, célèbre avocat spécialiste du droit d’auteur, lui-même auteur d’innombrables livres et également président du Pen club France. Le cadre : un débat intitulé « nouvelles morales, nouvelles censures », le titre d’un livre de Pierrat, le 15 août en un lieu improbable, l’école des filles, ou plutôt l’ancienne école des filles, à Huelgoat, où la galeriste bretonne et parisienne

Noureddine Boukrouh : Pour un islam du XXIe siècle… et d’après

Le problème central du monde musulman aujourd’hui est que sa religion a été figée dans une interprétation et des rites vieux de plusieurs siècles et qu’il s’est encore moins adaptés que d’autres religions à l’évolution des sociétés. Le salafisme, sacralisation de cet islam « premier », n’est qu’une manifestation extrême d’une inadaptation à son temps qui vaut aussi pour la religion enseignée à tous les musulmans. Il n’y a pas de différence substantielle entre le droit islamique professé à la célèbre université islamique Al-Azhar du Caire et celui de Daech. C’est ce que développe l’intellectuel

Lecture : Rwanda, la fin du silence, témoignage d’un officier français

Il faut lire Rwanda, la fin du silence, témoignage d’un officier français. L’officier en question c’est Guillaume Ancel qui, à l’été 1994, a participé comme capitaine à l’opération Turquoise lancée le 22 juin par la France dans ce pays d’Afrique où se déroulait un génocide contre les Tutsi (800 000 morts en trois mois) orchestré par le gouvernement en place à dominante hutue. Le livre, préfacé par l’historien Stéphane Audouin-Rouzeau, est publié aux Belles Lettres, dans la collection Mémoires de guerre où Ancel est en bonne compagnie (Buzzati, Churchill, Galula, Kipling, etc.) et c’est la

Commémorer à l’heure des réseaux sociaux

Dix des douze membres du Haut Comité aux Commémorations Nationales ont présenté leur démission à la ministre de la Culture pour protester contre le retrait de Charles Maurras du Livre des commémorations de l’année 2018 (la naissance du théoricien du nationalisme intégral en 1868). Ils affirment ne pas pouvoir travailler avec la menace permanente de la censure ou de l’autocensure. Commémoration ou célébration, la clarification faite en 2011 pour le cinquantenaire de la mort de Louis-Ferdinand Céline n’aura pas duré longtemps. A l’heure des réseaux sociaux c’était prévisible ! La décision de

Notre-Dame de la gouvernance

Dans le long feuilleton Notre-Dame-des-Landes, l’accueil réservé à la décision gouvernementale d’abandonner le projet n’est pas le moindre des enseignements : aux trois-quarts les Français l’ont plébiscitée ! Quelques points séparent les sondés de « droite » ou de « gauche » mais les clivages traditionnels (autorité/laxisme, économie/écologie) n’ont pas fonctionné comme lors du référendum local (55/45). Personne n’imagine pour autant que les Français ont adhéré en masse aux méthodes radicales du zadisme. Plus profondément, la décision a conforté deux tendances de fond que les politiques