
La crise va-t-elle faire revenir en force
l’Avare et l’Oncle Picsou, dont le point commun est, on le sait, d’aimer regarder, contempler, palper, jour après jour, toute leur épargne en forme de tas d’or, jusqu’à s’y asseoir ou s’y jucher pour bien s’assurer de sa matérialité ?
Pour eux, point de papier monnaie fiduciaire, la confiance en l’Etat qui l’émet n’y est pas ; encore moins de compte bancaire pour y loger leurs avoirs, le scriptural est trop immatériel, partant trop précaire, et la confiance en une banque dépositaire n’y est pas.
Alors que, des « Emprunts russes » défaillants au Mexique jadis, de l’Argentine naguère à l’Islande, Dubaï et la Grèce aujourd’hui,
des Etats en faillite ou menacés de l’être rappellent régulièrement au public d’épargnants et déposants qu’un pays peut ne pas honorer ses dettes, alors que les déficits et l’endettement publics s’accroissent vertigineusement sous l’effet de la crise dans la plupart des pays développés, petits et grands, alors que du Président de la République française appelant de ses vœux un nouveau Bretton Woods – régime qui, rappelons-le, faisait de l’or l’étalon et le gage ultimes du système monétaire international via un dollar US lui-même convertible en or à taux fixe – aux dirigeants chinois en appelant désormais à une autre monnaie internationale que le dollar devenu inconvertible il y a près de 40 ans, le prix de l’or ne cesse de monter sur les marchés mondiaux, ayant en deux ans franchi les caps historiques des 900, 1000, 1100 et même 1200 dollars l’once.
L’or longtemps oublié, ignoré, rejeté, méprisé, car démonétisé et ne produisant pas d’intérêts, retrouve des couleurs jusque dans les recommandations de bien des gérants de portefeuille en même temps qu’ils se détournent des placements en obligations publiques, et l’un des trois meilleurs gérants français récemment sélectionnés par le magazine Challenges va jusqu’à situer l’or à … 4000 dollars l’once dans les prochaines années.
Parallèlement,
des économistes réputés ultra-libéraux, en même temps qu’ils dénoncent la création monétaire « à gogo » et à taux d’intérêt quasi-nuls pratiquée par les principales banques centrales, et la détérioration corrélative des risques portés aux bilans massivement gonflés de ces dernières,
vont jusqu’à envisager le retour à des monnaies … privées, jugées plus sûres car mieux gérées, « en père de famille », par les établissements concernés, et mieux gagées – sur l’or par exemple … – que les monnaies fiduciaires à cours forcé.
Il y a un an déjà dans ces mêmes colonnes, nous nous interrogions sur le thème « sauvetage du privé… naufrage des Etats ? », et il y a six mois, nous y écrivions à propos de l’or : « Quo non ascendet ? » – jusqu’où ne montera-t-il pas ? – devise du surintendant Fouquet dont, comme on sait, la montée … finit fort mal !
Et aujourd’hui, dans un même contexte de surendettement public généralisé, les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est bien possible que l’or – comme d’autres métaux précieux, et autres « objets réels » fongibles, pétrole, minerais, etc. –
aient encore de beaux jours devant eux, non seulement comme valeur d’usage réputée rare à l’heure où l’on mesure la finitude de notre planète et de ses ressources, mais comme valeur refuge si la perte de confiance dans les signatures publiques (comme la dévalorisation de la parole publique d’ailleurs…) devait se propager et avec elle, le risque quasi-mécanique d’une « défiduciarisation » des monnaies légales …
Lourde question certes, mais mieux vaut en tout cas se la poser sans plus attendre pour inciter, s’il en est encore temps,
nos gouvernants à plus de vertu dans leur gestion, ici et ailleurs.
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