Démocratie

Relecture de "Comment les démocraties finissent"

Je vous suggère, quarante ans après, une relecture du livre de Jean-François Revel : « Comment les démocraties finissent » (Grasset,1983). Plus généralement, ces relectures de livres jalons sur des thèmes d’actualité peuvent être un exercice salutaire. L’auteur mettait en lumière les principales menaces qui pèsent sur les régimes démocratiques Revel souligne que le populisme peut jouer un rôle majeur dans la fin des démocraties en exploitant les frustrations et les peurs populaires pour parvenir au pouvoir. Il met en garde contre les leaders populistes qui utilisent des discours simplistes et

Stupéfaction face au spectacle de la « chose publique »

En quelques années, le spectacle de la chose publique s’est transformé. Ce spectacle, qui suscitait approbation ou adhésion, agacement ou colère, provoque aujourd’hui stupéfaction et désarroi. Certes, il n’a jamais été immuable et a toujours comporté une part d’irrationnel et de passion. Ce qui a d’abord changé, ce sont les médias et les nouvelles techniques de communication qui ont donné progressivement à l’image et à l’instantané une place croissante et ont fait des responsables politiques des acteurs tenus de réussir leur show. La vie politique s’est accélérée, le temps court est devenu la

"Fabrique du collectif : osons le conflit salutaire !" avec Laurent Quivogne

« J’aimerais qu’il y ait plus de conflits dans le monde pour qu’il y ait moins de violence » : c’est ainsi que Laurent Quivogne [i] débute son intervention à la Matinale organisée par le Club. Comment faire pour que les « conflits » ne dégénèrent en violence ? C’est l’idée qui anime la réflexion de son livre « Oser le conflit, éviter la violence : pour des relations apaisées » (2023). Le titre -et c’est un peu son objectif concède Laurent- interpelle et fait mouche. Car le sentiment général est que la violence augmente autour de nous et que, sans aller jusqu’à parler des récentes « émeutes »

Digressions sur un 14 juillet

Depuis presque toujours je regarde le défilé du 14 juillet. J’avoue être chaque fois ému par la rigueur dans la mise en œuvre des cérémonies et la charge symbolique de cet instant de communion nationale. Je pense aussi que l’événement est tout sauf anodin et moins convenu qu’il en a l’air. De la réaction du public (depuis quelques années les sifflets au passage du command-car du Président sont de rigueur) jusqu’au choix des invités en passant par la présence millimétrée de l’Europe, les animations et les rappels à l’histoire (cette année la Résistance), on peut saisir le portrait fugace d’une

Le mutualisme, un modèle économique alternatif exigeant

Fort de son expérience de mutualiste, Christian Oyarbide [i] vient de publier dans la collection Mondes en transitions « Réinventer le mutualisme ». En filigrane dans son livre comme régulièrement au long de son intervention au Club, il appelle les dirigeants mutualistes à mieux tenir les « promesses » qu’ils font à travers l’affichage de valeurs fortes mais exigeantes « affichées sur leur fronton ». Pour lui le mutualisme est bien placé répondre aux nouveaux besoins d’une société en quête d’utilité sociale et de sens. Et pour y parvenir l'une des questions essentielles à se poser est : "peut

Veut-on encore être gouverné ?

Les concerts de casseroles résument désormais une profonde crise politique et sociale dont on retiendra que la cause immédiate fut la réforme des retraites. Reste à en saisir les causes profondes, au-delà des idiosyncrasies françaises et du « c’est la faute à Macron », argument qui, s’il n’est pas sans fondement, ne suffit pas à l’explication. Quasiment partout, les institutions du monde libéral perdent en efficacité. Elles sont moins « fluides » et semblent davantage crisper que réconcilier. Quelque chose dans la société leur échappe qu’elles ne parviennent plus à amalgamer, à synthétiser, à

Contre les referendums

À la faveur des débats et manifestations contre la réforme des retraites en France voici mon « coming out » : bien que très attaché à la défense de la démocratie, des libertés et de l’État de droit je crois que le référendum est une fausse bonne idée. J’imagine ce que cette affirmation peut avoir de choquant pour tous ceux qui, logiquement, y voient une rare occasion d’expression démocratique directe du peuple. Comment tenter de justifier cette position dans laquelle entre, je dois l’avouer, une part d’intuition ? Une partie non négligeable de la mission non dite ou peu dite de l’État, donc du

Ukraine, à la fin ce sont les démocraties qui gagnent

Le pouvoir russe n’a pas renoncé à ses buts maximalistes. Il veut soumettre l’Ukraine. Si ça ne fonctionne pas, il la détruira. La propagande, toujours habile à renverser les responsabilités, explique que les Ukrainiens n’ont qu’à se laisser faire et que les Occidentaux prolongent leurs souffrances en livrant des armes, comme la victime d’un viol prolonge ses souffrances en résistant. Les connaisseurs du poutinisme ont largement décrit sa nature criminelle dont le viol est une des facettes [1]. Elle est l’une des raisons pour lesquelles une victoire de la Russie est devenue impossible, dans le

Résilience démocratique

Il y a deux ans, les démocraties occidentales paraissaient poussées vers un déclin inexorable. Prises au dépourvu par la pandémie du COVID elles se battaient entre elles pour obtenir de précieuses cargaisons (masques, respirateurs et autres principes actifs) venues d’une Chine disciplinée qui soulignait à l’envi le chaos occidental. Les démocraties illibérales, Hongrie en tête, s’engouffraient dans la brèche géopolitique et claironnaient la supériorité des vaccins russe et chinois pour ajouter à l’humiliation. Trump récoltait 74 millions de voix, manquait de peu sa réélection et imposait son

Ukraine, comment vaincre la résistance de Poutine à la modernité ?

Les analyses abondent et convergent pour dire que Poutine s’enfonce dans la guerre. A défaut d’avoir l’initiative miliaire, il pousse les feux sur les fronts de la guerre hybride (pseudo-annexions, menace nucléaire, gazoducs/ énergie) qui ne peuvent rien si ce n’est aggraver sa fuite en avant. Sur le terrain les choses accélèrent. L’armée ukrainienne avance avec détermination et efficacité, elle pousse l’armée russe dans la spirale de l’échec, c’est-à-dire l’accumulation de mauvais réflexes et d’erreurs. Le pari de la mobilisation est douteux. Dans La conduite de la guerre [1], le major Fuller