Ouf ! Nous sommes sauvés ! Le « front républicain » (et une mobilisation quasi inespérée de l’électorat) ont permis de repousser (jusqu’à quand ?) la menace de la prise de pouvoir du FN. Pourtant, cette « victoire » républicaine en est-elle vraiment une ?
Car, si j’étais un électeur du FN, je nourrirais une frustration énorme, voire une haine féroce contre ce système prétendument « démocratique » qui fait tout pour que mon bulletin (ainsi que celui de plus de 6,8 millions de mes concitoyens) ne permette pas que je sois justement représenté… Démocratiques ces petits arrangements entre amis (arrangements qu’ils habillent d’un prétendu « front républicain »), membres de l’establishment politique, qui se partagent le pouvoir depuis plus de 30 ans ? Mon vote FN fait-il de moi un paria ? Alors que depuis plus de 30 ans, ces ploutocrates ne se préoccupent pas du fait que je vis de moins en moins bien, que je me sens de plus en plus étranger dans ma cité, que ma situation est de plus en plus précaire, que je suis de plus en plus désabusé, pourquoi n’aurai-je pas le droit à « autre chose » ? Nous ne sommes pourtant pas 6,8 millions de « fachos » ! Juste des commerçants, des artisans, des ouvriers, des paysans, des chômeurs dont les « élites » ne se préoccupent pas, des laissés-pour-compte de la mondialisation ! Il me vient parfois (furtivement, rassurez-vous) le regret que le FN n’ait pas remporté au moins une région. Nous sommes tous convaincus (à l’exclusion de leurs 6,8 millions d’électeurs) que les solutions qu’il préconise sont vouées à l’échec sur le plan économique et dangereuses pour nos valeurs. Alors pourquoi ne pas le mettre à l’épreuve ? L’exercice des responsabilités ne permettrait-il pas de démythifier ses solutions et de « dégonfler » le phénomène FN ? Bien davantage que les anathèmes. Le prix à payer serait peut-être élevé pour la région en question, mais certainement moindre que pour le pays tout entier (pensons aux prochaines élections présidentielles). Car la menace croît, de scrutin en scrutin. Une échéance majeure étant en vue, qui aura le courage politique de changer de logiciel et de dépasser les déclarations d’intention habituelles en ces circonstances ? Les premiers discours des ténors de droite comme de gauche sont-ils à la hauteur ? Philippe Tixier, dans ces colonnes proposait, après le 1er tour, d'« ouvrir un dialogue avec les politiques représentant les minorités mal servies par le jeu électoral ». Les politiques peut-être pas (pour négocier quoi ?), mais les électeurs à coup sûr (pour les convaincre). Car, si on continue à les ignorer et si rien ne change, qu’est ce qui empêchera ces 6,8 millions d’électeurs de se retrouver suffisamment nombreux en 2017 pour provoquer un « accident » électoral et… démocratique majeur ? On ne pourra pas toujours masquer le mépris et les échecs par des cris d’orfraie. Alors, messieurs les politiques, redonnez nous, et surtout redonnez leur, davantage d’espoir ! Il doit bien y avoir, dans ce pays, des hommes et des femmes de bonne volonté pour s’atteler à cette tâche. Pourquoi ne pourraient-ils pas rechercher un consensus qui ferait sens en ces temps de crise ?
Commentaires
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La "crise" de la démocratie existe dans tous les états "démocratiques".
Les élus déçoivent les électeurs, et l'alternance ne résoud rien.
Mais en France ça "rouspète" plus fort qu'ailleurs, et le populisme semble plus proche de gagner les élections nationales.
Comment font nos voisins ? En Allemagne, pays phare sur bien des sujets, la "grande coalition" gouverne avec une certaine réussite. Mais ce pays a surtout osé des réformes impopulaires et efficaces.
En Angleterre, Il y a des alliances pour gouverner. Mais Margaret Tatcher a "botté le cul" aux profiteurs de l'immobilisme et a balayé un grand nombre de positions de rentiers.
En Italie, Matteo Renzi secoue enfin les rigidités de la "combinazione".
La Suisse a supprimé d'un coup tous les statuts de fonctionnaires. Les prélèvements obligatoires y sont passés en dix ans de 45 % à 23 % (la France est à 51%, et ça augmente encore). Dans ce pays, chacun sait bien qu'il doit d'abord apporter quelque chose aux autres plutôt que de réclamer une assistance.
Alors, quel attitude faut il adopter envers les électeurs et les élus du front national ?
D'abord les mettre en responsabilité, sans que le pouvoir qu'on leur donne puisse sérieusement nuire. C'est ce qui c'est passé dans beaucoup de municipalités. Et le résultat est sans appel: surtout des désastres...
Au niveau des régions, pourquoi ne pas confier aux conseillers FN des responsabilités encadrées ? Les sortir de la position facile où ils peuvent critiquer sans "mouiller leur chemise".
Mais combien de conseillers FN accepteraient il de jouer ce jeu, sans encourir les foudres de la direction du parti, et sans susciter la "haine" du front républicain ? C'est justement ce qui serait à voir !
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