Galileo, système de radionavigation européen, dont le premier satellite a été mis sur orbite le 28 décembre dernier, nous a été présenté comme « l’Europe qui gagne », expression à peine appuyée pour sous-entendre « pas comme le 29 mai », date du non français au référendum sur la constitution européenne. En effet, on peut facilement se flatter que l’Europe soit capable, dans un domaine de haute technologie et stratégiquement capital, de concurrencer les USA et leur système GPS, en proposant un système bien meilleur notamment en terme de précision. Ce serait toutefois oublier plusieurs détails.
Tout d’abord, le retard accumulé par les européens sera difficile à combler : les premiers concepts du GPS datent des années soixante et leur première application opérationnelle civile débutent dès 1993. Douze ans après, l’Europe lance seulement le premier des 30 satellites prévus, pour lesquels aucune date n’est avancé. Et pour cause, le financement n’est pas encore totalement assuré. Il faudra vraisemblablement attendre la fin des tests prévus au mieux en 2008 pour qu’un calendrier définitif soit avancé. A l’image d’ITER, ce projet est budgétivore. Un certain nombre de domaines de recherche innovants pourraient en faire les frais. Pendant ce temps, les américains travaillent déjà à une nouvelle génération de GPS afin de corriger les défauts du système actuel. Elle est annoncée pour 2013.
Et en attendant, dans le monde entier le terme « GPS » restera le synonyme de radionavigation. En cela, l’Europe a déjà perdu la bataille des mots.
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Les difficultés de l'Europe avec GALILEO sont loin d'être derrière elle et elles ne sont pas que financières !
La question souvent occultée, car elle peut sembler très technique et rébarbative est celle de la problématique générale de la Gestion Harmonisée des Fréquences sur l'espace européen.
Les structures administratives qui en ont la charge agissent en ordre dispersé, sans véritable concertation. La ressource naturelle "fréquence disponible" devient un enjeu vital pour le développement de nos économies numériques. Quelles sont les questions ? Quel rapport avec GALILEO ?
D'abord l' IUT . C’est un organe, dépendant des Nations Unies, qui est chargé d’harmoniser le fonctionnement des télécommunications au niveau mondial à partir de l’établissement de règles communes et de la diffusion d’information (fichier des références internationales des fréquences par exemple).
Ensuite, le CEPT. C’est un organe international constitué par 46 pays (dont ceux constituant l'Europe ) qui ne traite que de problèmes techniques.
Au niveau de la Communauté Européenne, il n’existe pas d’institution susceptible de définir une politique européenne autonome, une stratégie commune en matière d’utilisation du spectre des fréquences radioélectriques en association avec des choix spécifiques propres à chacun des pays constitutifs.
De plus, la répartition des compétences et les procédures administratives à l’intérieur de chaque pays sont souvent différentes.
Compte tenu que le spectre est « une denrée rare » et que la tendance en matière de demande de transmission d’information est en forte croissance, nous serons contraints à plus ou moins brève échéance de rechercher des axes d’harmonisation permettant d’engager une démarche prospective et non plus curative afin d’optimiser l’utilisation du spectre.
Exemples :
La TNT qui nécessiterait l’élaboration d’un calendrier permettant de déterminer la date de suppression de la transmission analogique et d’analyser les retombées industrielles potentielles,
L’UMTS qui se développe sans qu’un minimum de lignes directrices n’aient été élaborées,
Et surtout, GALILEO dont on connaît mal l’impact stratégique et les retombées économiques mais dont on sait que la réalisation en termes d'attribution des fréquences nécessaires est loin d'être assurée… En tout cas, l'Europe seule ne maîtrise pas son destin…
Au plan international, il serait donc souhaitable que la Communauté Européenne se dote de moyens permettant d’harmoniser ses positions, de les affirmer et de rechercher des consensus face à une certaine forme de dictat américain en la matière qui a adopté au niveau des fréquences spatiales la stratégie du "premier occupant.
Convaincu des aspects bienfaiteurs de la construction européenne amenant à une modernisation globale de tous les secteurs, il a été constaté a contrario la fragmentation des organisations et donc des processus de décision conduisant à un déficit de « vision commune ». Ce déficit conduit inéluctablement à une désorientation des politiques industrielles nationales des différents pays membres. Nous n’avons pas débattu des conséquences de cette désorientation tellement les impacts socio-économiques étaient évidents.
Quoiqu'il en soit, l'indépendance de l'Europe en matières de Télécommunications spatiales est loin d'être assuré sauf à "acheter américain"…
Henri-Paul Soulodre
( Extrait d'un compte-rendu d'un groupe de travail Parthénon en collaboration avec des ingénieurs de l' ANF)
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