Epanouissement durable ? S’appuyer sur les tendances lourdes

091026-Epanouissement.jpgIl y a quelques siècles, l’Europe s’est mise en quête de la Raison et du bonheur personnel. Elle a inventé l’enchaînement des progrès scientifiques et techniques, l’explosion démographique, l’entreprise autonome et le développement industriel, la société de cour puis la société de consommation, l’Etat souverain et un système de nations antagonistes.

Elle a survécu, amoindrie, à ses totalitarismes et à ses guerres dévastatrices mais elle a transmis plusieurs de ses virus au reste de la planète.  

Notre civilisation scientifique, technique, industrielle et de consommation, devenue mondiale, détériore l’écosystème terrestre et entame ses ressources à un point tel que se pose le problème de la survie de la civilisation, voire de l’espèce humaine. Si nous continuons à nous développer sur la même ligne, la Terre ne supportera pas les 9 milliards d’humains qui devraient, sauf catastrophe, la peupler vers 2050. Et nous risquons de nous battre avec des armes de destruction massive. 

Nous ne nous en sortirons pas sans de nouveaux modes de production, de vie, de consommation, d’économie, de gouvernance. Il faudrait nous dégager du système de la compétition pour la consommation, l’appropriation et le profit immédiat. Il faudrait que l’humanité découvre les voies d’un développement durable et s’entende pour agir en inventant une gouvernance post-autoritaire, post-étatique et post-nationale. Il faudrait qu’émerge une civilisation qui permettrait à l’espèce humaine et à la nature de s’allier pour favoriser un progressif épanouissement mutuel. Mais, Crozier ou Chaban-Delmas objecteraient justement qu’on ne change pas la civilisation par décret. 

Ce n’est cependant pas sans espoir car la civilisation change d’elle-même. En dépit de quelques tendances pernicieuses, les vents dominants qui structurent l’évolution anthroposociologique du dernier demi-siècle nous mettent sur le chemin d’un épanouissement durable. Cinq de ces tendances lourdes me semblent particulièrement porteuses ; nous devons  mieux les comprendre, les alimenter et accélérer leur développement.  

Ø  D’une société d’individus mimétiques centrés sur la consommation ostentatoire émerge une société de personnes autonomes  qui apprennent à se fabriquer du bien-être puis, de plus en plus explicitement, la vie qui leur convient et leur apporte un  meilleur épanouissement au sein des collectifs auxquels ils tiennent.  

Ø  Une société hiérarchique et compartimentée en masses s’efface devant  une société de plain-pied, complexe, fluide, enchevêtrée et en grande partie auto-adaptative. Des rémanences de hiérarchie circulent et permutent alors que de nouvelles formes de leadership empathique et participatif se cherchent.  

Ø  Un système planétaire d’états souverains et guerriers s’effrite alors qu’émerge péniblement une gouvernance locale/mondiale pacificatrice à la recherche de ses bonnes formes. Elle sera indispensable si nous espérons relever pacifiquement et intelligemment les défis écologiques auxquels nous sommes confrontés.  

Ø  Les progrès en cours des micro-télé-communications, de la biologie moléculaire, des nanotechnologies, des neurosciences et de la microsociologie nous centrent sur les mailles les plus fines de la réalité. Ils vont probablement déboucher sur des transformations radicales de nos façons de produire, de voir le monde et la vie et de nous orienter. Ils nous ouvriront des opportunités (dont nous saurons peut-être profiter) de trouver de nouveaux accords entre l’espèce humaine et la Nature.  

Ø  Les pays émergen
ts
(sous l’influence notamment de leurs femmes, de leurs classes moyennes montantes, du développement explosif des systèmes de télécommunication interpersonnelle, …) évoluent avec une rapidité surprenante dans les mêmes directions que les pays anciennement développés.
 

Les circonstances sont aujourd’hui favorables à ce qu’émergent, ici et là, des initiatives qui nous engageront sur la voie d’un épanouissement durable et déboucheront sur une politique de civilisation. 

D’abord, l’intelligence collective s’y prête. L’immense vague de croyance en la menace climatique et écologique qui s’est levée au cours des dernières années, d’Amérique en Asie en passant par l’Europe, n’est pas seulement un signe de réalisme populaire ; c’est aussi le signe que nos populations rêvent d’une autre société et qu’elles sont heureuses de se sentir contraintes d’accélérer le pas. Et elles vont faire pression sur les gouvernements, les entreprises et les associations. 

D’autre part, la crise financière et économique mondiale, aussi dramatique soit-elle, a plusieurs aspects bénéfiques dont nous devons tirer parti :  

Ø  Elle nourrit le rejet populaire de l’hypercapitalisme financier qui nous a submergés et a freiné une partie de nos évolutions épanouissantes au cours du dernier quart de siècle.  

Ø  Mettant nos gouvernants au pied du mur, elle accélère le mouvement vers une mondialisation des systèmes de gouvernance.  

Ø  Elle conduit bon nombre de grandes entreprises à être moins obnubilés par leurs profits financiers à court terme. Elles redécouvrent que pour alimenter leur vitalité et leur développement durable elles doivent trouver de nouvelles synergies avec leur personnel, leurs consommateurs, la société et l’écologie planétaire. Ce faisant, elles seront porteuses d’épanouissement.  

L’Europe n’est pas la plus mal placée pour incarner cette tentative originale et enviable de construire une économie et une société orientées vers l’épanouissement socio-humain et la construction d’une nouvelle alliance entre l’espèce humaine et la nature. 

La première chose à faire est de nourrir le sentiment d’urgence qui suscitera des prises d’initiatives.

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Commentaires

"Notre civilisation scientifique, technique, industrielle et de consommation, devenue mondiale, détériore l’écosystème terrestre et entame ses ressources à un point tel que se pose le problème de la survie de la civilisation, voire de l’espèce humaine."
Le catastrophisme ne sert à rien.
L'espèce humaine n'est pas du tout menacée.
"La première chose à faire est de nourrir le sentiment d’urgence qui suscitera des prises d’initiatives."
On ne construit rien de durable dans l'urgence et la peur. L'heuristique de la peur rend aussi impuissant que le lapin devant le boa.
Le gens changent quand le changement les motive, quand ils comprennent ce qu'ils peuvent gagner personnelement du changement. La clé, c'est la motivation.

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