L’institution judiciaire s’est toujours méfiée des autorités administratives ayant un pouvoir de sanction comme l’A.M.F. (Autorité des Marchés Financiers) et la Commission de la Concurrence. Ainsi, de nombreuses sanctions de la COB (Commission des Opérations de Bourse) ont été cassées en appel, d’ailleurs souvent pour de bonnes raisons : le « contradictoire » (par lequel tout mis en cause a droit à une procédure transparente qui lui permet, dès le début, de se défendre face à un système qui instruit ni à charge, ni à décharge) n’était pas toujours respecté.
La COB sur le tard puis l’A.M.F y ont mis bon ordre et les décisions sont désormais le plus souvent confirmées par les cours d’appel. Reste qu’en théorie le justiciable de l’A.M.F. encourt un risque de double peine, le procureur pouvant d’autant plus déclencher une procédure judiciaire que le secrétaire général de l’A.M.F. lui adresse copie de son dossier.
Le rapport Coulon, du nom de l’ancien Premier Président de la cour d’appel, remis récemment à la garde des Sceaux, stigmatise ce danger. Qu’en est-il en réalité ? Dans la plupart des cas, le juge d’instruction saisi par le procureur s’en remet aux conclusions de l’A.M.F. Et, dans les rares dossiers où tel n’est pas le cas, le montant de la sanction de l’A.M.F. peut s’imputer et s’impute, en réalité, sur le contenu financier de la décision judiciaire.
Bref, la pratique de la double peine paraît sagement encadrée.
Tirer prétexte de cette locution fortement connotée pour faire rentrer dans le rang une A.M.F. réduite à la portion congrue serait, une fois de plus, céder à ce penchant français qui consiste à faire battre le pendule jusqu’à son extrémité plutôt que d’en saisir le point moyen.
Que les services d’enquête de l’A.M.F, plus étoffés et professionnels que ceux des tribunaux, soient mis à leur disposition, que les deux procédures se conjuguent plus étroitement, voilà ce que l’on peut souhaiter. Aller plus loin ferait de la France l’un des rares pays développés à ne bénéficier que d’une régulation des marchés financiers au rabais à une époque où ces marchés financiers n’ont jamais tant mérités d’être régulés.
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