La Chine à Copenhague

100119-COPENHAGUE-CHINE.jpgL’attitude de la Chine lors du sommet de Copenhague a été très révélatrice de sa conception du système mondial et de la place qu’elle entend y occuper. Plusieurs leçons, parmi d’autres, peuvent en être retenues.

  1. Ce sommet a été le point d’orgue d’une année 2009 marquée par une montée en puissance de la Chine sur le plan stratégique (G20 de Londres, mise en cause du dollar comme devise internationale, représentation au FMI, etc.) et non plus seulement sur le plan économique.
  2. En conséquence l’aval de la Chine devient incontournable pour le règlement des grands dossiers internationaux.
  3. Cela ne signifie pas qu’un G2 sino-américain soit devenu le nouveau directoire du monde : pour preuve, l’attitude inflexible de Pékin à Copenhague face à aux exigences américaines. D’ailleurs Wen Jiaobo a formellement rejeté ce concept de G2 à Prague le 20/5/2009: « Certains disent que les affaires du monde seront gérées uniquement par la Chine et les États-Unis. Je crois que ce point de vue est sans fondement et faux.»
  4. Sur la réduction des gaz à effet de serre, les positions irréconciliables de Washington et de Pékin étaient les suivantes :

- Les États-Unis (qui n’ont pas ratifié le protocole de Kyoto) ont proposé une réduction de 17 % de leurs émissions de CO2 en 2020 par rapport à 2005, soit une très modeste réduction de 4% par rapport à 1990. Encore cet effort limité était-il assorti de conditions : les pays émergents, et en tout premier lieu la Chine, devraient prendre des mesures équivalentes et se soumettre au contrôle d’une autorité indépendante, demandes inacceptables pour la Chine (un « monitoring » international serait une atteinte à la souveraineté nationale du point de vue de Pékin).

- La Chine a indiqué qu’elle augmenterait dans une fourchette de 15 % à 20 % d'ici 2020 la part des énergies renouvelables dans sa consommation d’énergie ; de plus, elle a proposé de réduire d’environ 40 % - voire de 45 % - par rapport à 2005 l’«intensité carbone » de son économie (ce qui ne garantit pas une réduction des émissions en valeur absolue, si la croissance reste forte). Pour elle, la responsabilité historique des pays développés est écrasante et les mêmes exigences ne peuvent être imposées aux pays en développement (le « droit à polluer »).

  1. Ce n’est pas la pression exercée par les pays développés, États-Unis en tête, qui accélérera les avancées de la Chine en matière de protection de l’environnement, mais celle de l’opinion publique chinoise. Le désastre écologique contribue à la montée de la contestation populaire (« les émeutes vertes »). Ce sont donc des considérations de politique intérieure qui motiveront les arbitrages que le pouvoir va devra opérer entre le rythme de la croissance et la qualité de vie. Des clivages divisent les deux pôles du Comité central entre les tenants d’une très forte croissance malgré son coût social et environnemental et les partisans d’une croissance plus juste et plus durable. On peut penser que ces derniers ont pris l’avantage face à la montée de la contestation populaire  : le tournant « vert » de la Chine pourrait donc être tout aussi spectaculaire que son « ascension » industrielle et commerciale.
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