Ceux qui, en Europe, espéraient que la République Islamique d’Iran puisse se muer en une démocratie irréprochable, sont déçus. Que la fraude ait été massive ou qu’elle ait seulement donné un coup de pouce il y a eu, c’est le moins que l’on puisse dire, quelques anomalies. Vues d’Europe ou d’Amérique, la contestation attire la sympathie, la répression suscite l’opprobre ; le régime iranien, considéré comme hostile, est crédité des pires intentions.
Vues d’Arabie, qui est encore sous le joug d’un wahhabisme intransigeant, vues aussi d’Egypte, d’Algérie et autres pays musulmans où les élections sont de pure forme, les choses sont apparues sous un jour différent. Fraude ou pas, il y a eu débat, la vie politique a été trépidante, la société s’est exprimée. Et, comme l’Iran semblait être doté d’institutions assez souples, certains opposants espéraient que son régime pourrait servir de modèle à des pays musulmans même sunnites. Quelques potentats auraient alors eu tout à craindre du réveil de peuples cherchant leur inspiration du côté de Téhéran. Lorsque Khamenei a cautionné la répression et tenté de verrouiller le régime, la déception a été terrible pour tous ceux qui, dans le monde musulman, aspirent à concilier religion et liberté. Quelques optimistes entretiennent la flamme d’un espoir ténu de réconciliation à l’iranienne.
Vu de Turquie, c’est une autre histoire. Les négociations pour entrer dans l’Europe ont permis à un gouvernement « modérément islamique » d’améliorer la démocratie en se débarrassant de la tutelle militaire. Aujourd’hui, religion et liberté sont, au moins partiellement, réconciliées. La Turquie est, mieux que l’Iran, prête à servir de modèle. L’Europe y aurait tout intérêt et l’on peut même imaginer un scénario où la Turquie, après avoir tiré parti de la négociation avec l’UE pour s’aligner sur des structures modernes, n’ait plus envie d’adhérer à un club majoritairement chrétien.
Vu d’Israël, le bilan est contrasté. Ceux qui croyaient qu’Obama pourrait relancer rapidement le processus de paix sont déçus. Les autres sont soulagés tout en craignant qu’Obama se montre naïf et, qu’à long terme, l’Iran sorte vainqueur d’un éventuel rapprochement.
Pour Obama, le jeu est complexe. L’élection en Iran ne change pas la géographie et, puisque Bush a commis l’insanité d’entrer en Irak, il a besoin, lui, de l’Iran pour en sortir. Il ne doit pas pour autant accepter l’engrenage qui aboutisse à une Bombe pour les ayatollahs. Jusqu’où pourra-t-il aller ? Est-il concevable, qu’en bout de course, les Iraniens disposent, comme les Allemands, les Japonais et beaucoup d’autres, de tout le matériel nécessaire à la fabrication d’une arme nucléaire mais que l’AIEA (Agence Internationale pour l’Energie Atomique) ait les moyens de s’assurer que le stade ultime n’est pas franchi ? Si, tel était le cas, Israël se satisferait-il d’une telle assurance ?
Dans vingt ans, l’approvisionnement énergétique du monde sera largement tributaire du gaz iranien et du pétrole irakien. Les investissements doivent démarrer aussi vite que possible. Les Etats-Unis, l’Europe et l’Iran sont condamnés à s’entendre. Quelles que soient leurs tendances politiques, les Israéliens ne veulent pas que cette entente se fasse sur leur dos.
Les problèmes sont liés, leur corrélation est explosive.
Correspondants du Club
(Informations recueillies entre le 12 et le 21 juin... A suivre)
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