A quelques jours d’intervalle, Google, principal moteur de recherche sur Internet et véritable success story depuis des années, a envoyé deux signaux à priori totalement contradictoires. Le premier a été son refus de communiquer au ministère américain de la Justice des listes de résultats des recherches lancées sur son site, dans le cadre de la lutte contre la pornographie et la protection des enfants en ligne. Alors que ses concurrents, MSN de Microsoft, AOL et Yahoo !, ont répondu favorablement à la demande du Département de la justice, Google s’érige en défenseur des libertés civiles. Ce qui n’a pas été du goût de Wall Street puisque, malgré d’excellents résultats financiers en 2005 – en hausse de 86 % par rapport à 2004 -, l’action a dérouillé de près de 10%.
Le second signal fut sa décision d’accepter le diktat de Pékin et de s’autocensurer sur son site chinois notamment pour toutes les recherches portant sur les droits de l’homme, ce qui fut soulève un tollé parmi l’ensemble des observateurs pour qui Google a toujours représenté un symbole de la liberté d’expression. Google soutient que l’accès restreint à l’information vaut mieux que pas d’accès du tout. Les puristes y voient un bradage de la liberté d’expression sur l’autel d’un marché de 111 millions d’internautes chinois.
On imagine pourtant que ces deux décisions, qui viennent brouiller l’image de rebelle du Net que Google s’est forgée, ont dû être difficiles à prendre et sujettes à d’âpres discussions en interne. Tout porte à croire que le moteur de recherche est en train de traverser sa première sérieuse crise de croissance : entre l’idéalisme du début et la réalité purement économique, ce type de choix risque de se multiplier. Et l’opportunité de ménager en quelques jours les deux ne se représentera pas à chaque fois. Google paierait ainsi sa boulimie de croissance au prix - de plus en plus élevé ? - de la normalité.
Commentaires
Permalien
Meriem,
Google est obligé de se conformer à la loi des pays sur lesquels il s'installe, il le fait aussi pour la France en ce qui concerne par exemple la pédophilie ou le neonazisme. Ce n'est pas à mon sens tant ça qui est choquant et qui devrait nous interroger.
Dans les démocraties occidentales et communément considérées libres, les internautes ont la possibilité de consulter les sites étrangers pour contourner ces "interdictions". Ce qui est particulièrement remarquable dans cette histoire, c'est la formidable capacité de filtrage et de surveillance dont dispose la Chine. Cela devrait constituer pour nous, occidentaux, un motif essentiel de surveillance de nos libertés d'expression alors qu'il y a fort à parier que tout sera désormais mis en œuvre pour les réduire ou les règlementer...
José
Permalien
A-t-on des données fiables sur le nombre d'internautes Chinois ? Je doute qu'ils soient très nombreux,ce qui expliquerait cette capacité de surveillance et de filtrage. Qu'en sera-t-il dans quelques dizaines d'années ? Même les Etats-Unis, avec leurs gigantesques moyens (NSA,par exemple) n'ont pas cette capacité. Je ne me fais pas trop de soucis pour nos libertés occidentales, encore qu'il faille, bien sûr, rester vigilant !
Alain
Permalien
@ Alain : Ils seraient même, selon les chercheurs de la société Analysys International , 134 millions à avoir une connexion Internet à domicile. Gros joueurs en ligne, ils seraient, d'ores et déjà, 35 millions à être abonnés à un service de jeu en ligne, une augmentation de près de 50 % par rapport à 2004.
Quant aux Etats-Unis, il n'y a pas de filtrage a priori mais un "contrôle" a postériori. Différence fondamentale avec la Chine où la censure et le filtrage sont menés de manière tout à fait officielle.
Cdt, Meriem
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