On en parle peu, mais le patronat a demandé une baisse des retraites de 5% dans le cadre de la négociation sur les retraites complémentaires AGIRC ARRCO. Certes ce n’est pas dit comme cela. Certes c’est une baisse étalée sur cinq ans en revalorisant les retraites moins que l’inflation. Certes les syndicats vont négocier l’ampleur de ce recul. Mais c’est bien de cela qu’il s’agit.

Pour la première fois on parle presque franchement de baisse des retraites en France.

Nous les retraités, notamment les retraités cadres, n’osons pas trop rouspéter. Nous sommes conscients que cette baisse des retraites est déjà une réalité dans d’autres pays d’Europe. Nous savons que, statistiquement, le sort des retraités s’est beaucoup amélioré au cours des dernières décennies alors que celui des actifs et notamment des jeunes actifs s’est plutôt dégradé. Ajoutons-y que la génération qui part en retraite est celle des baby boomers qui laissent aux jeunes une économie en mauvais état, des dettes etc….

Ce n’est pas une raison pour ne pas s’arrêter sur ce qui est un vrai tournant et y réfléchir un peu. D’autant que, sauf malheur, la plupart d’entre nous seront des retraités un jour. Trois points pour lancer le débat.

1- Est-il indécent de réaffirmer que reculer l’âge de la retraite reste un meilleur moyen de régler les problèmes de déséquilibre du système, ne serait-ce qu’en termes de production globale de richesses ? Avec les problèmes que nous connaissons et qui sont ceux de l’emploi des « seniors ». On ne peut à la fois commencer à pousser vers la sortie les actifs dès 50 ans et ne leur permettre d’accéder à la retraite qu’à 65 ou plus.

2- Est-il inconvenant de suggérer d’autre part qu’on s’organise pour avoir une vue d’ensemble du recul de pouvoir d’achat des retraités ? Car on va assister à une multiplication de petites mesures, non coordonnées, toutes justifiées par le même raisonnement de base sur la dégradation de la situation des jeunes actifs par rapport aux retraités : augmentations de cotisations sociales, suppression d’avantages fiscaux, blocage des loyers … Il serait bon qu’une fois par an un « observatoire de la baisse du pouvoir d’achat des retraités » prenne la mesure de l’effet global.

3- Peut-on enfin s’arrêter quelques instants sur le principe de l’intangibilité des droits à la retraite liquidés. Commençons par rappeler qu’il n’a aucune valeur juridique. C’est le conseil constitutionnel qui le dit. Notons cependant qu’il est assez solidement ancré dans les esprits. Il reflète cette idée, qu’une fois la décision prise de s’arrêter, sur la base de ses droits tels qu’il les connaît le retraité n’a plus beaucoup de marge de manœuvre et que l’on créé une forte insécurité dans la société si l’idée se répand que rien n’est moins sûr qu’une retraite liquidée.

Le précédent gouvernement a néanmoins donné une marge de manœuvre importante aux jeunes retraités en autorisant très largement le cumul emploi retraite. Cette ressource n’en est plus une pour les plus âgés. Pour réguler la baisse du pouvoir d’achat des retraités peut-être faudra-t-il créer en plus de la distinction entre « petites » et moins petites retraites, déjà prise en compte, une distinction en fonction de l’âge des retraités.