Les principaux signataires du traité de Versailles, de gauche à droite : David Lloyd George, Vittorio Orlando, Georges Clémenceau, et Thomas Woodrow Wilson
C’est ainsi que Yanis Varoufakis, le Ministre grec des Finances (démissionné depuis) qui a participé aux négociations marathon sur le plan d’aide à son pays, a dénoncé l’accord intervenu in extremis entre la Grèce et l’Eurogroupe. Yanis Varoufakis a le sens des formules choc. Mais n’a-t-il pas raison ? Le Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919, a marqué la fin de la 1ère Guerre mondiale. Entre autres dispositions, il édictait les lourdes sanctions prises à l’encontre de l’Allemagne par les Alliés. Beaucoup d’historiens considèrent que les frustrations et les déséquilibres qu’il a créés ont été pour beaucoup dans la naissance du nazisme et de la 2ème Guerre mondiale. En effet, l’état d’esprit dans lequel il a été rédigé et imposé à l’Allemagne était celui de la revanche. L’accord entre l’Eurogroupe et la Grèce peut-il être comparé à ce fameux Traité de Versailles ?
Les membres de l’Eurogroupe n’appréciaient pas Yanis Varoufakis qui leur tenait tête et ne respectait pas leurs codes (sa démission aurait été une des conditions de l’obtention d’un accord pour éviter la sortie de la Grèce de l’Euro) et n’ont pas goûté non plus (c’est un euphémisme) l’annonce par Alexis Tsipras du référendum du 5 juillet invitant les grecs à repousser le programme d’austérité exigé par eux. Certains responsables européens se sont même directement (et, osons le mot, scandaleusement) immiscés dans cette consultation démocratique. Alors oui, on sent comme un goût de revanche dans ce 3ème plan d’aide. Il instaure en effet une véritable mise sous tutelle complète et oh combien humiliante des autorités du pays : retour des équipes d’experts de la « Troïka » (Europe, BCE, FMI) à Athènes, droit de veto des « institutions » (comprendre : la technostructure européenne) sur toute nouvelle loi, abandon des lois adoptées depuis janvier par le gouvernement Syriza sans l’accord des créanciers, « aide technique » de la Commission européenne (comprendre : implication de la technostructure européenne dans la gestion des affaires publiques grecques), … Bref ! L’Europe compte désormais parmi ses membres un « protectorat ». Qu’en penseraient ses pères fondateurs ? Comme l’Allemagne en 1919, déclarée coupable d’avoir provoqué la guerre et sévèrement punie, la Grèce est déclarée coupable de n’avoir pas réussi à se réformer pour satisfaire aux deux plans d’aide précédents… et punie tout aussi sévèrement. Or, cet accord, tout le monde (Christine Lagarde, Dominique Strauss-Kahn, le Nobel d'économie Paul Krugman et bien d’autres économistes de tous bords) s’accorde à le trouver techniquement irréaliste et politiquement dangereux. Il ne semble satisfaire que les technocrates qui l’ont élaboré et les politiques qui l’ont obtenu (à l'exception notable d'Alexis Tsipras qui a déclaré "qu'il n'y croyait pas"!). Alors, comme le Traité de Versailles, de quelles futures épreuves douloureuses (ou, pourquoi pas, dramatiques) l’accord de Bruxelles du 13 juillet 2015 est-il annonciateur ?
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