Concours de sortie

090224-CarteMonde.jpg« La guerre, a dit Mussolini, est l’examen de passage des nations ». Plus modeste et moins grandiloquent, Braudel a évoqué en historien les crises économiques et financières. « La crise, a-t-il écrit, est une épreuve, les forts la traversent, les faibles y succombent ». Ainsi, est-ce consécutivement à des crises que les « centres du monde » se sont déplacés. Venise, par exemple, a « succombé » tandis qu’Amsterdam a « traversé » plusieurs épreuves avant d’être supplanté par Londres.

A l’issue de la crise actuelle, les Etats-Unis resteront-ils N°1 malgré l’accumulation de leurs déficits et la décrépitude de leur industrie ? Les paris sont ouverts. Personnellement, je crois qu’ils conserveront leur prééminence. 

La Chine n’est, sans doute, pas encore apte à devenir N°1. Peut-être même est-il trop tôt pour dire quelles nations d’Asie sortiront renforcées de la crise et quelles autres en sortiront affaiblies. En revanche, il est presque certain que, globalement, l’Asie accroîtra son poids relatif dans les affaires du monde et que la coopération régionale sera accentuée.

La Chine, le Japon et Taiwan ont besoin de débouchés ; leurs réserves financières sont immenses ; ils ne laisseront pas tomber leurs clients les plus proches.  

En Amérique Latine, pas de suspens : le Brésil y est roi. Ni le Mexique, ni l’Argentine, ni le Chili, ni le Venezuela n’ont, comme lui, la capacité de surfer sur la crise. Cependant, même s’il parvient à catalyser la coopération régionale, la baisse brutale du cours des matières premières le privera des moyens de renflouer tous les éclopés du continent. Les plus démunis, comme la plupart des pays d’Afrique (et comme les Etats qui, tel l’Ukraine, sont assis entre deux zones) n’auront que le FMI pour pleurer. 

En Europe, on se sera aperçu que l’endettement des ménages plombe les nations encore plus sûrement que l’endettement des Etats. La Grande Bretagne qui, de surcroît, a beaucoup misé sur la City, perdra en importance tandis que l’Allemagne accentuera son avance et que la France consolidera sa place de N°2 européen. Place plus ou moins enviable selon que l’Europe, dans son ensemble, pèsera plus ou moins lourd ! 

Pour l’Europe, la crise est bel et bien un examen de passage. Dans le pire des cas, la monnaie unique volera en éclat et l’Union donnera le triste spectacle de la désunion. Dans le meilleur des cas, les institutions européennes gagneront en efficacité et feront germer une solidarité mondiale. L’enjeu est capital car, s’il fallait résumer en une seule phrase le pourquoi de la crise actuelle, on pourrait arguer que la cause profonde réside dans le déséquilibre entre pouvoirs politiques nationaux et structures économiques mondialisées. En ce sens, l’Europe a le devoir de mériter la première place au concours de sortie de crise. Non seulement les pays membres en tireraient bénéfice mais toutes les nations pourraient s’inspirer d’un exemple pour encadrer leur interdépendance de fait dans une interdépendance de droit.

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