In extremis, le gouvernement ukrainien refuse de signer l’accord d’association avec l’Union européenne. Ce sont les Européens de l’Est, Pologne en tête, qui avaient imposé le partenariat oriental au sommet de l’UE, à Prague, en mai 2009.
Il s’agissait pour eux d’une démarche politique pour étendre la présence européenne dans les pays sous influence russe depuis la chute de l’URSS. Pour l’Ouest de l’Europe les choses étaient moins claires. Aujourd’hui les autorités françaises sont silencieuses, leur réaction est un mélange de soulagement, d’indifférence et de fatalisme. La décision du gouvernement prorusse serait dans l’ordre des choses, un pointillé de plus dans l’histoire de l’Ukraine, Etat-nation européen ou russe selon la rive du Dniepr où l’on se trouve. Les puissances de l’Ouest (Grande-Bretagne, France, Etats-Unis), prudentes, lui ont toujours refusé leur garantie de sécurité ; elles admettent que sa souveraineté est, de fait, imbriquée à celle du voisin russe. Ça tombe bien, tout à son complexe d’encerclement et d’anti occidentalisme, Moscou fonctionne avec le même logiciel de l’ancienne realpolitik. Sur le mode « Poutine humilie l’UE », le pic médiatique qui suit l’échec de l’accord propose la même clé de lecture : un rapport de forces d’en haut, entre puissances.
Et puis vint le peuple, le peuple ukrainien exaspéré par la médiocrité de ses dirigeants, le clientélisme court terme, la brutalité policière, les passe-droits, la corruption, la captation des richesses et les abus de ceux qui détiennent l’autorité et qui, d’ailleurs, ne semblent la détenir qu’à ces fins. Les peuples se révoltent rarement pour un traité technique d’association, ils se révoltent pour leur liberté, dans le sens le plus concret. Ce qui fut vrai hier à Tunis, l’est aujourd’hui à Kiev. Pendant longtemps, le droit international s’est appelé le droit des gens, un droit imprégné de l’idée que les gens peuvent jouir paisiblement de leurs droits et que la violation de ce principe par la puissance publique entraîne un droit de résistance à l’oppression. L’oppression existe, elle existe en Europe - et en Méditerranée - dans le proche voisinage de l’Europe.
L’Europe, les associations, les clubs doivent défendre les contestataires de Kiev, ils ont besoin d’être soutenus, besoin d’entendre que le droit des gens est légitime, fût-il dans l’angle mort de la compréhension des autorités françaises.
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