Architecte, urbaniste et ancien maire adjoint à l’urbanisme de la ville de Vanves, je suis en colère contre la décision annoncée dimanche soir 29 janvier par le Président de la République et vraisemblable candidat à l’élection présidentielle pour résoudre le problème du logement : augmenter de 30% la capacité de construction de tous les terrains de France.
Oui le coût du logement monte inexorablement en France et notre pays manque de logements.
Oui la pénurie de foncier et le prix du foncier sont, dans les zones les plus tendues, les facteurs qui poussent à la hausse. Tous les professionnels sont d’accord.
Mais le premier effet de la mesure annoncée par Nicolas Sarkozy va être d’arrêter toutes les ventes de terrain en cours et donc les projets qui allaient avec. Le prix d’un terrain à bâtir se calcule en fonction de la S.H.O.N. (Surface hors d’œuvres nette) soit sa capacité de construction. Plus elle est importante, plus le prix augmente. Les propriétaires fonciers ont entendu dimanche soir que le Président de la République leur annonçait un immense cadeau. En attendant d’en savoir plus ils vont exiger un prix supérieur de leurs terrains et ceci va rouvrir toutes les négociations. Cet effet est beaucoup plus certain que l’hypothétique augmentation de l’offre qui contribuerait à calmer les prix.
En plus cette nouvelle augmentation des droits à construire va être inapplicable - en tout cas à court terme- dans beaucoup de villes et sur beaucoup de terrains.
Il faut savoir d’abord que dans le cadre du Grenelle II, une ordonnance en date du 16 novembre 2011 augmente déjà les droits à construire en supprimant du calcul l’épaisseur des murs périphériques. C’est déjà un accroissement considérable de l’espace autorisé aux bâtiments sur les terrains que j’estime à 20%. Il se justifie au demeurant par l’idée que les nouvelles normes d’isolation obligent à doubler l’épaisseur des murs. Cette nouvelle règle qui fait déjà plus que compenser l’épaississement des murs entrera en vigueur le 1er mars 2012.
Si on y ajoute la dernière annonce c’est donc au total une augmentation de 50% au moins du droit à construire des bâtiments qu’il faudrait rendre rapidement applicable.
Or, dans un règlement d’urbanisme le C.O.S. (coefficient d’occupation du sol) ne représente qu’un article sur 14 ou 15 qui encadrent la construction : limites de hauteur, implantation par rapport aux limites du terrain, emprise au sol etc... Les professionnels savent bien qu’il est difficile, parfois impossible, de construire tous les mètres carrés autorisés par le C.O.S.
De toutes manières la modification d’un règlement d’urbanisme exige des études et de la concertation et se réalise au mieux sur plusieurs années.
Oui je suis d’accord pour qu’on facilite dans toute la mesure du possible l’agrandissement des maisons et pavillons des particuliers. Je l’ai fait en tant que maire adjoint. Oui je suis d’accord pour une densification de la ville qui limite le mitage foncier.
Mais il n’y a pas de coup de baguette magique. C’est un mensonge de dire qu’on va multiplier rapidement de cette manière les surfaces à construire et abaisser les prix.
Commentaires
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Chère Véronique,
Je crains fort que vous ayez raison ! Et que la « fausse bonne idée » de Nicolas Sarkozy engendre plus d’effets pervers que de processus vertueux.
Pour reprendre les choses à la base, j’aimerais savoir ce que vous pensez du « point clé » rédigé par Roger Fauroux et publié sur notre site le 25 janvier 2010 (http://www.clubdesvigilants.com/archives/2010/01/en-finir-avec-le-mal-lo...). Pensez-vous que ces préconisations sur le renouvellement urbain (SRUS) et la redensification du centre des villes soient, d’une part, pertinentes et, d’autre part, suffisantes ? C’est le moment ou jamais de relancer le débat.
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