Je m’étais dit que je ne vous parlerai pas de la réédition ce mois-ci chez Odile Jacob du livre sur « Les patrons sous l’Occupation » que j’avais écrit avec Renaud de Rochebrune parce que les Vigilants sont plus tournés vers l’avenir que vers l’histoire. Mais l’histoire comporte quelques leçons.
Parmi celles que j’ai retrouvées en me replongeant dans ce texte, il y a celle-ci : la France déteste la concurrence, y compris son patronat supposé libéral voire hyper libéral pour adopter le vocabulaire à la mode. Certes ce vieux fond est aujourd’hui bien masqué par deux ou trois décennies de dérégulation, mais je suis convaincu qu’il ne faut pas souffler beaucoup sur les braises pour les rallumer. Le tout étant d’éviter l’incendie.
Le sujet est d’actualité. C’est Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, qui, par petites touches met régulièrement la question sur le tapis et promeut une politique de modération de la concurrence. Devant l’association des journalistes économiques (AJEF) il stigmatisait récemment « la maladie du low cost ». Il faut que le consommateur soit prêt à payer un peu plus cher sa marinière made in France ou son bœuf garanti bleu blanc rouge. Un peu plus tard le même jour c’est de Bruxelles qu’il parlait, et du « carcan » que les eurocrates font peser en interdisant les aides d’Etat, carcan contre lequel il veut mener bataille. Quelques jours plus tard on apprend qu’il veut couper les ailes à l’ARCEP, l’autorité de régulation des télécommunications, qui aurait trop fait pencher la balance en faveur du consommateur.
La tentation est grande de lui emboîter le pas tant nous sommes convaincus d’avoir basculé dans un monde totalement concurrentiel avec tout ce que cette concurrence a de dur pour ceux qui la subissent et d’agaçant parfois pour les consommateurs eux-mêmes.
C’est l’OCDE qui nous rappelle à l’ordre dans le rapport sur la France qui vient de sortir (19 mars). Elle nous nous redit ce que la commission Attali nous avait rappelé il n’y a pas si longtemps : la concurrence est beaucoup moins développée en France que nous ne le pensons. « Les réformes permettant de lever les obstacles à la concurrence sont essentielles en France, estiment les économistes de l’organisation internationale, car elles sont susceptibles d’élever le revenu national dans des proportions importantes ». Suivent quantité d’exemples. Nous sommes beaucoup moins tombés dans la concurrence que nous ne le pensons.
Méfions-nous des très vieux mais très vivaces démons nationaux qui nous pousseraient à revenir en arrière.
Lire les PDF de la table des matières et de l’index du livre sur l’Occupation :
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